Grandir est une aventure riche, ponctuée de découvertes, de réussites et parfois de turbulences. Chaque enfant suit son propre rythme de développement, influencé par son tempérament, son histoire personnelle, son environnement familial et social. Si certaines difficultés sont normales et passagères, d’autres peuvent nécessiter un accompagnement psychologique. Mais comment repérer les signaux d’alerte ? Et surtout, quand faut-il consulter un psychologue pour son enfant ?
Des signes qui ne trompent pas : repérer le mal-être de l’enfant
Les enfants n’expriment pas leur mal-être comme les adultes. Il est rare qu’un enfant dise spontanément « Je ne vais pas bien ». Son langage passe souvent par le corps, le comportement ou les relations aux autres. Certains signes doivent éveiller l’attention des parents ou des proches :
- Troubles du sommeil : cauchemars fréquents, terreurs nocturnes, insomnies ou refus d’aller se coucher peuvent signaler un stress ou une anxiété sous-jacente.
- Changements dans l’appétit : perte d’appétit ou au contraire grignotages excessifs peuvent être liés à une souffrance psychique.
- Comportements inhabituels : colère soudaine, irritabilité, pleurs fréquents, repli sur soi ou, à l’inverse, agitation excessive et comportements impulsifs.
- Difficultés scolaires : chute des résultats, manque de concentration, phobie scolaire, isolement en classe.
- Problèmes relationnels : conflits répétés avec les pairs ou les adultes, refus de participer aux activités sociales.
- Douleurs physiques inexpliquées : maux de tête, maux de ventre, eczéma ou autres somatisations persistantes.
Il ne s’agit pas d’être alarmiste à la moindre crise ou colère. Mais si ces manifestations perdurent, s’intensifient, ou interfèrent avec le quotidien de l’enfant, il est légitime de chercher de l’aide.
Un contexte de vie à considérer
Un mal-être psychique chez l’enfant est souvent en lien avec des événements de vie qui le déstabilisent. Une séparation parentale, un déménagement, un deuil, l’arrivée d’un petit frère ou d’une petite sœur, des conflits familiaux, des difficultés scolaires ou un changement d’école sont autant de situations qui peuvent venir fragiliser son équilibre.
Parfois, l’enfant ne parvient pas à mettre des mots sur ce qu’il vit. Il peut alors développer des comportements « symptômes », qui signalent une tension interne. Dans ces cas, le rôle du psychologue est d’accueillir l’expression de ce malaise, de le comprendre avec l’enfant et sa famille, et de proposer un cadre d’accompagnement sécurisant.
Que se passe-t-il en consultation ?
Contrairement à l’imaginaire collectif, consulter un psychologue n’est ni un acte de faiblesse, ni une solution réservée aux cas graves. C’est avant tout offrir un espace d’écoute à son enfant, un lieu où il pourra déposer ce qui le traverse, à son rythme.
Le psychologue adapte son approche en fonction de l’âge et de la personnalité de l’enfant. Il utilise souvent des médiations thérapeutiques comme le jeu, le dessin, le photolangage ou les marionnettes pour faciliter l’expression de l’enfant. Ces outils permettent à l’enfant de symboliser ce qu’il vit, surtout quand les mots manquent.
Ce travail ne se fait pas uniquement avec l’enfant : les parents ont une place centrale dans l’accompagnement. Des temps d’échange avec eux sont proposés pour comprendre le contexte familial, réfléchir aux pistes d’accompagnement, et soutenir leur posture éducative.
Illustration clinique : L’histoire de « Léna »
Léna, 9 ans, est adressée par son institutrice car elle présente une agitation constante en classe, interrompt les autres, se lève sans autorisation et pleure souvent. À la maison, ses parents décrivent une petite fille « dans l’opposition permanente », qui refuse de faire ses devoirs, dort peu, et se montre très jalouse de sa petite sœur.
Lors des premières séances, Léna ne parle presque pas. Elle dessine des scènes de colère, détruit parfois ses créations. À travers le jeu, elle commence à évoquer des situations conflictuelles avec sa sœur, puis révèle sa peur que ses parents l’aiment moins depuis la naissance de celle-ci. En parallèle, les entretiens parentaux permettent d’explorer les changements récents dans la dynamique familiale et d’ajuster les repères éducatifs à la maison.
Après quelques mois, Léna parvient à verbaliser davantage ses émotions. À l’école, les enseignants remarquent une amélioration de sa concentration et une diminution des comportements perturbateurs. Le travail thérapeutique a permis d’ouvrir un espace de parole, de soutenir les liens familiaux et d’accompagner une phase de remaniement affectif importante.
Pourquoi ne pas attendre ?
Il n’est pas nécessaire d’attendre que la situation soit critique pour consulter. Bien souvent, les parents ressentent que « quelque chose ne va pas » sans pouvoir mettre précisément le doigt dessus. Cette intuition est précieuse. Un premier échange avec un professionnel permet parfois de distinguer ce qui relève du développement normal de l’enfant, de ce qui nécessite un soutien plus structuré.
Consulter en prévention permet aussi d’éviter que la souffrance ne s’installe, et de favoriser un développement émotionnel plus apaisé.
Un accompagnement sur mesure
Chaque suivi est unique. Il peut s’agir de quelques séances ponctuelles ou d’un accompagnement plus long. Ce qui guide le travail thérapeutique, c’est la singularité de l’enfant, son histoire, son rythme. Le psychologue n’apporte pas de réponses toutes faites, mais construit avec l’enfant et sa famille un chemin vers un mieux-être.
Le rôle du psychologue est aussi de faire le lien, si besoin, avec d’autres professionnels (orthophoniste, psychomotricien, pédopsychiatre, école, etc.) pour proposer une prise en charge globale et cohérente.
En conclusion : Un acte bienveillant
Faire appel à un psychologue pour son enfant n’est pas un aveu d’échec, mais un acte d’amour et de responsabilité. C’est reconnaître qu’un soutien extérieur peut parfois faire toute la différence pour traverser une période difficile. C’est offrir à son enfant un espace d’écoute protégé, où il pourra grandir en confiance.
Dans un monde en mouvement constant, il est essentiel de pouvoir s’arrêter un instant, d’écouter ce que l’enfant ne dit pas toujours avec des mots, et de l’accompagner dans l’apprentissage de lui-même.